La loi Avia : un projet retoqué
Le 18 juin dernier, le Conseil constitutionnel a déclaré en partie invalide la loi Avia. Alors que l’Assemblée nationale l’avait approuvée le 13 mai. Cette loi, destinée à lutter contre les contenus haineux sur Internet, n’est donc plus applicable. De ce fait, son rejet partiel remet en cause l’essence même de son contenu.
Un délai d’appréciation trop court
A l’origine, la députée Laetitia Avia a initié ce projet. L’article premier de ce texte avait pour but d’imposer aux plateformes du Net de retirer sous 24 heures toute publication illicite. Ce délai étant appliqué dès qu’un signalement a été fait. A la base, cette loi visait à limiter tous les contenus manifestement haineux, racistes, homophobes, sexistes ou négationnistes. Par ailleurs, ce texte voulait aussi lutter contre la pédopornographie. A travers lui, les sites concernés auraient pu être considérés responsables pénalement. Cependant, le Conseil constitutionnel a finalement estimé que le délai de 24 heures pour établir des sanctions était trop court. Car le temps imparti risquait d’être trop bref pour estimer correctement le bien-fondé d’un signalement. Ainsi, cela pourrait entraîner une censure injustifiée de textes qui sont en réalité admissibles. Par conséquent, la loi Avia risquerait de nuire à des propos simplement critiques ou controversés.
Des retraits du Net contestés
Initialement, concernant les délits les plus graves, comme l’apologie du terrorisme ou les contenus pédopornographiques, les retraits devaient s’effectuer en moins d’une heure. Cependant, le Conseil constitutionnel a également rejeté ce délai. Car là encore, il l’a jugé trop court. En effet, une heure ne permettrait pas « d’obtenir une décision d’un juge ». Même si les contenus visés semblent porter « […] gravement atteinte à l’ordre public et aux droits des tiers. ». Ainsi, cette procédure pouvait entraîner une décision administrative arbitraire.
La loi Avia, protéger les libertés individuelles
Au final, la loi Avia risquerait de porter atteinte aux libertés individuelles. Une conséquence jugée « […] ni adaptée, ni proportionnée ». Néanmoins, malgré ces critiques, une partie du contenu de la loi Avia a été conservée. A savoir, des sanctions dissuasives en cas de signalements abusifs. Ainsi que la mise en place d’un bouton de signalement, dédié aux contenus haineux.
Un projet à l’arrêt
En mai dernier, l’Assemblée nationale a réintégré dans la loi Avia sa mesure la plus critiquée. A savoir, celle qui dérangeait le plus les sénateurs à l’origine de la saisine constitutionnelle. En théorie, cette loi aurait dû s’appliquer en trois phases. Dans un premier temps, cela aurait permis de ne rendre effectifs que quelques articles. Cela, dès la promulgation et la publication de cette loi au Journal officiel. Ensuite, à partir du 1er juillet 2020, on aurait appliqué ses articles 2 et 3, plus une partie du quatrième. Puis le 1er janvier 2021, une dernière partie de son article 4.
Des articles non intégrables
Enfin, pour achever de bloquer ce projet de loi, le Conseil constitutionnel a censuré ses articles 11 et 12. De fait, il a estimé que dans leur forme, ils constituaient des « cavaliers législatifs ». En clair, qu’ils n’étaient pas clairement liés aux objectifs poursuivis par cette loi. De ce fait, cette critique a rendu inapplicable l’ensemble de la loi Avia.
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