Interdiction des corridas aux mineurs : un débat sensible
La question de l’interdiction des corridas aux mineurs reste problématique. En effet, les courses de taureaux, qui se concluent par une mise à mort, représentent toujours en France une exception culturelle. Cela entraîne un flou juridique qui entretient un conflit latent.
Les partisans de l’interdiction
En octobre dernier, Didier Guillaume, le ministre de l’Agriculture, avait suggéré que le Gouvernement envisageait l’interdiction des corridas aux mineurs. Par ailleurs, fin août, une proposition de loi allant dans ce sens avait aussi été envisagée par la députée LREM Aurore Berger. Derrière ce projet, on avait observé qu’une cinquantaine de députés de son groupe la soutenait. Or, aujourd’hui, cette question concernant le fait de laisser des mineurs voir ce type de spectacle, comportant une mise à mort, est loin d’être réglée. De fait, elle fait toujours réagir de façon très vive les élus qui proviennent de régions où les spectacles taurins sont fréquents. Notamment dans le Gard. Après avoir été très critiqué pour avoir vu une corrida, Didier Guillaume a tenté d’apaiser le débat au sujet des mineurs assistant à ce spectacle. Ainsi, iI a déclaré « […] de toute façon, ils ne fréquentent pas les arènes ».
Une législation contradictoire
En théorie, l’interdiction des corridas aux mineurs est juridiquement possible. Cependant, avant d’être systématiquement appliquée en France, elle devra être motivée plus clairement. En effet, elle diffère de l’interdiction automatique « Interdit aux moins de 18 ans », habituelle avec les jeux d’argent. Avant d’être acquise, l’interdiction des corridas aux mineurs devra être précisée légalement. Notamment au niveau de la limite d’âge fixée. De fait, celle-ci pourra s’étendre entre 12 et 16 ans. Par exemple, en Espagne et en Amérique du Sud, les mineurs ont le droit d’assister aux corridas. En effet, dans ces pays, les écoles de tauromachie acceptent des adolescents dès l’âge de 14 ans. Cependant, ils ne pratiquent pas la mise à mort.
Une loi peu claire pour l’interdiction des corridas aux mineurs
L’interdiction des corridas aux mineurs se mélange avec d’autres contradictions juridiques.
Autre complexité, à ce jour, le droit français interdit tout « acte de cruauté envers les animaux domestiques apprivoisés ou tenus en captivité ». Cela, « […] que l’acte soit effectué publiquement ou non ». C’est l’article 521 du Code pénal. Problème, les peines encourues peuvent aller jusqu’à deux ans de prison. Mais les sanctions prévues « […] ne sont pas applicables aux courses de taureaux, lorsqu’une tradition locale ininterrompue peut être évoquée ». Alors, finalement, quelles limites la France va-t-elle choisir ? Actuellement, la question reste en suspens. Elle réapparaîtra sans doute cet été, au moment de la reprise de la pleine saison des corridas.
Un conflit qui se durcit
Aujourd’hui, le conflit qui oppose les aficionados, défenseurs de la corrida, et les protecteurs de la cause animale dure quasiment depuis 50 ans. Régulièrement, ils s’affrontent par communiqués de presse interposés. Cependant, dernièrement, les tensions se sont durcies entre les deux clans. Comme l’année dernière, à Rodilhan, dans le Gard, où les forces de l’ordre ont dû empêcher qu’un groupe anti-corrida et des spectateurs n’en viennent aux mains. Cela dépasse largement l’interdiction des corridas aux mineurs.
Une chute très nette
En attendant, ce qui est sûr, c’est que la fréquentation des arènes est en chute libre. Ainsi, en six ans, dans les arènes de Nîmes, le nombre de spectateurs a baissé de 30 %. Sans doute la conséquence du prix élevé des places, du public qui vieillit, et de l’évolution des mentalités face à la condition animale. Ces trois facteurs affaiblissent peu à peu l’engouement pour les corridas. Là encore, cette érosion dépasse l’interdiction des corridas aux mineurs. Même si ce phénomène est plus lent dans les Landes et le Pays basque. Pour sa part, Didier Bonnet, président du CRAC en Europe, le Comité Radicalement Anti-Corrida, estime que dans 20 ans « la corrida s’arrêtera toute seule en France et ne sera plus rentable en Espagne ».
- Nous vous invitons à lire également notre article sur la progression des idées animalistes
- Le Bulletin des Communes vous suggère aussi l’article du Midi Libre