En déplacement à Saint-Quentin, dans l’Aisne, le 7 novembre, Serge Papin, ministre délégué chargé des PMF, du Commerce, de l’Artisanat, du Tourisme et du Pouvoir d’achat, a dévoilé un premier train de neuf mesures destinées à redynamiser le commerce de proximité. Ce plan, très attendu par les élus locaux et les professionnels, vise à enrayer la désertification commerciale qui touche de nombreuses communes, notamment dans les centres-villes et les petites centralités.

Une urgence économique et sociale

Les commerces de proximité traversent une période critique. Fermetures successives, hausse des coûts de l’énergie, difficultés de recrutement, concurrence du commerce en ligne et des grandes surfaces périphériques… la situation se dégrade depuis plusieurs années. Dans certaines communes, les vitrines vides se multiplient, symboles d’un déclin urbain préoccupant.

Le gouvernement entend réagir. Ce plan, porté par Serge Papin, s’inscrit dans une stratégie plus large de revitalisation des territoires, en lien avec les élus locaux, les chambres consulaires et les associations de commerçants. Le ministre a rappelé que le commerce de proximité n’est pas seulement une activité économique, mais un vecteur de lien social et d’attractivité territoriale.

Objectif : cibler les opérations de revitalisation du territoire

Le dispositif s’appuie sur les opérations de revitalisation du territoire (ORT), créées par la loi Élan. Ces opérations permettent à une commune ou un groupement de communes de définir un périmètre d’intervention prioritaire, généralement centré sur le cœur de ville.

L’une des mesures phares annoncées consiste à étendre l’usage de la taxe sur les friches commerciales à ce périmètre ORT. Concrètement, cette taxe s’appliquera plus systématiquement aux propriétaires laissant volontairement des locaux commerciaux vacants dans les zones centrales, afin d’inciter à leur réutilisation.

Le produit de cette taxe sera réaffecté au financement de projets de redynamisation locale : réhabilitation de locaux, soutien à l’installation d’artisans ou de commerçants indépendants, création d’espaces mixtes entre commerce, services et culture.

Les neuf premières mesures détaillées

Le ministre a présenté neuf leviers d’action complémentaires, qui seront déployés dès 2026 :

  1. Activation ciblée de la taxe sur les friches commerciales dans les périmètres ORT, pour lutter contre la vacance des locaux en centre-ville.
  2. Simplification des démarches administratives pour l’ouverture, la rénovation ou la transmission des commerces. Un guichet unique numérique sera mis en place pour les artisans et commerçants.
  3. Création d’un fonds d’accompagnement des territoires commerçants, doté de plusieurs millions d’euros, destiné à cofinancer les projets des collectivités.
  4. Renforcement du programme “Petites Villes de Demain” avec un volet commerce, pour soutenir les bourgs et petites centralités en perte d’activité.
  5. Aide à la reprise des commerces vacants, via un dispositif de prêt participatif et de subvention d’installation pour les jeunes entrepreneurs.
  6. Encouragement des circuits courts et de la production locale dans les commerces alimentaires, en lien avec les chambres d’agriculture.
  7. Développement de la formation et de l’apprentissage dans les métiers du commerce et de l’artisanat, afin de pallier la pénurie de main-d’œuvre qualifiée.
  8. Soutien à la digitalisation des commerces, avec un accompagnement personnalisé à la création de sites marchands et à la visibilité en ligne.
  9. Lancement d’un baromètre du commerce de proximité, pour suivre l’évolution de la vacance commerciale et mesurer l’efficacité des politiques publiques.

Une concertation nationale élargie

Ces annonces ne marquent qu’une première étape. Le ministère prévoit, d’ici la fin de l’hiver, une concertation avec les élus et les fédérations professionnelles afin d’affiner la stratégie. Les propositions des territoires seront remontées au niveau national pour préparer une seconde vague de mesures à l’été 2026.

Serge Papin souhaite bâtir une politique pérenne de soutien au commerce local, articulée avec les objectifs de sobriété foncière et de revitalisation urbaine. “La vacance commerciale n’est pas une fatalité. Elle est souvent le symptôme d’un manque de coordination entre acteurs publics et privés. Nous voulons inverser cette logique”, a-t-il insisté lors de son déplacement.

Lutter contre la vacance commerciale : un enjeu national

La vacance commerciale dépasse aujourd’hui les 12 % en moyenne dans les centres-villes, selon les estimations les plus récentes. Dans certaines communes moyennes, elle atteint 20 %, entraînant une perte d’attractivité et une baisse des recettes fiscales locales.

Les causes sont multiples : évolution des modes de consommation, essor du e-commerce, hausse des loyers, rigidité des baux, mais aussi désertification résidentielle. Le gouvernement espère que les mesures fiscales incitatives et la mobilisation locale permettront de relancer une dynamique vertueuse.

Les collectivités locales seront invitées à jouer un rôle central dans la coordination des actions : recensement des locaux vacants, accompagnement des porteurs de projets, promotion du commerce de proximité et appui à la rénovation des façades commerciales.

Des outils adaptés aux réalités locales

Le ministre a également insisté sur la nécessité d’adapter les dispositifs à la diversité des territoires. Les problématiques ne sont pas les mêmes dans une métropole, une ville moyenne ou une commune rurale.

Dans les grandes agglomérations, la priorité sera de freiner l’étalement commercial et de redonner une place aux petits commerces dans les quartiers. Dans les villes moyennes, l’enjeu est de réinvestir les cœurs de ville en combinant habitat, commerce et services publics. Quant aux zones rurales, il s’agit de préserver les commerces multiservices, souvent essentiels à la vie locale.

Le gouvernement souhaite aussi renforcer les synergies entre programmes existants : Action Cœur de Ville, France Ruralités, Petites Villes de Demain, mais aussi les politiques régionales d’aménagement commercial.

Une mobilisation attendue des acteurs privés

Les fédérations de commerçants, les chambres de commerce et les associations d’élus locaux saluent la démarche mais appellent à la vigilance. Le succès de ce plan dépendra de la rapidité de mise en œuvre et de la stabilité des aides.

Les acteurs économiques demandent que les mesures soient pérennes et simples d’accès, sans complexité administrative excessive. Ils plaident aussi pour un dialogue étroit entre les collectivités et les commerçants afin de co-construire les projets.

Le secteur bancaire, de son côté, s’est dit prêt à accompagner le financement de la reprise des locaux vacants via des dispositifs de prêts à taux préférentiels.

Un signal fort pour les territoires

En inscrivant le commerce de proximité dans les priorités gouvernementales, l’exécutif envoie un message politique fort. Les centres-villes et bourgs ruraux sont au cœur du vivre-ensemble et du lien social. Leur déclin fragilise la cohésion nationale autant que l’économie locale.

Ces neuf premières mesures visent à inverser la tendance, en redonnant aux territoires les moyens d’agir. Si les résultats dépendront de la mobilisation collective, la démarche marque un tournant dans la manière d’aborder la revitalisation commerciale : non plus comme un problème isolé, mais comme un pilier de la transformation durable des villes françaises.

Les prochaines étapes préciseront les moyens budgétaires et les modalités concrètes d’application. Mais une chose est sûre : la redynamisation du commerce de proximité devient, enfin, une priorité nationale.