Abaissement de la vitesse : une mesure qui fait débat.
Rouler à 80 km/heure au lieu de 90 sur les routes secondaires, une décision qui vient d’être annoncée par le Premier ministre Édouard Philippe, devrait permettre de réduire considérablement le nombre de morts par accidents. Cependant, d’après une précédente étude, cette réduction de la vitesse maximale pourrait aussi avoir des répercussions financières lourdes pour le pays.
Appliquée sur 400.000 kilomètres de routes secondaires, en grande majorité des départementales, la baisse de la vitesse maximale autorisée sur ces routes ne fait pas que des heureux. Une grogne à laquelle s’attendait Édouard Philippe, qui entend néanmoins défendre cette mesure. À propos de la nouvelle réglementation, il a expliqué : « Je sais qu’elle va sauver des vies, et je veux sauver des vies. Je comprends les arguments, et même la mauvaise humeur, mais je ne le fais pas pour augmenter les recettes de l’État […]. Si pour sauver des vies il faut être impopulaire, j’accepte de l’être. » Cependant, cette modification risque de peser fortement sur l’économie française. C’est ce qu’avance une précédente étude publiée en 2014, réalisée par un économiste respecté, à l’époque où le comité d’experts du CNSR avait déjà proposé une limitation similaire. Cette analyse, « Modification des limitations de vitesse : bénéfices et coûts », établissait le bilan économique de cette mesure, aussi bien sur les autoroutes, les nationales que les départementales.
L’un des arguments avancés par cette étude est que le temps supplémentaire passé dans les trajets routiers, en raison d’une vitesse inférieure, a un coût. La limitation de vitesse appliquée sur les routes départementales augmentera nécessairement le temps passé sur les routes par l’ensemble des automobilistes. Cette augmentation, bien que faible par trajet, a été chiffrée à 203 millions d’heures. Si l’on applique la même règle permettant de calculer la rentabilité d’une infrastructure à cette perte de temps, celle-ci s’élèverait à 18 € de l’heure, soit une perte d’environ 3,7 milliards d’euros.
Cette analyse heurte beaucoup la Ligue contre la violence routière. Chantal Perrichon, sa présidente, lui oppose le fait que les accidents de la route coûtent 40 milliards d’euros au pays, s’appuyant sur l’estimation faite par la sécurité routière. Au sujet du temps perdu, elle contre-attaque en rétorquant que : « […] 6 millions de journées de travail sont perdues chaque année à cause des accidents de la route. » Avec cet argument, on devine que le débat concernant cette nouvelle limitation de vitesse est loin d’être clos.